Ustensile indispensable aujourd’hui pour les longs déplacements en voiture, le jerrycan a avant tout été développé durant la Seconde Guerre mondiale pour répondre aux besoins pratiques des soldats. Il fallait bien penser à faire le plein de temps en temps, et en temps de guerre, impossible de faire un détour par la station-service la plus proche.
Le jerrycan, une invention allemande.
Le jerrycan, plus souvent appelé bidon d’essence, est un récipient pour carburant. Son histoire commence en 1937. Ce modèle en acier a été inventé par les Allemands qui développent alors intensivement leur matériel militaire. La solution la plus simple pour le ravitaillement en carburant des véhicules apparaît évidente : ils doivent emporter avec eux une réserve d’essence.
Ravitaillement
C’est l’action d’apporter des provisions en nourriture, carburant et autres produits nécessaires.
Les Allemands appelaient ce récipient « kanister ». Pour répondre aux besoins des soldats, il fallait qu’il soit le plus pratique possible. Ainsi, il doit avoir une contenance de 20 litres et peser une vingtaine de kilogrammes, être facilement portable par un homme seul, de dimension facilitant le transport et le stockage dans un minimum de volume, être doté de poignées facilitant son transvasement et enfin être d’une fabrication simple et peu coûteuse.
Wehrmacht-Einheitskanister (jerricane), fixé sur un Kübelwagen de la Feldgendarmerie (Russie, 1943).
Crédit : Bundesarchiv Bild 101I-022-2926-07, Russland, Unternehmen « Zitadelle », VW Kübelwagen.jpg
Panzers transportant plusieurs jerrycans sur leurs plages arrière (Russie, été 1941).
Crédit : Bundesarchiv Bild 101I-265-0040A-22A, Russland, Panzer IV und Panzer II.jpg
Les premiers modèles de ce bidon carré sont alors fabriqués en grandes quantités, dans le plus grand secret, par les firmes Müller et ABP dès 1937. Ils équipent rapidement les troupes équipées de machines de l’armée allemande. Cette armée porte le nom de Wehrmacht.
Les Alliés, autrement dit, les Français, les Belges, les Anglais et les Américains, découvrirent ce « kanister » dès le commencement de la guerre en 1940. Pratique, il est rapidement copié et adopté par tous les autres pays en guerre. Le 6 juin 1944, lors du débarquement en Normandie, les Alliés en utilisent ainsi quelques 17 millions d’exemplaires.
Du kanister au jerrycan, qu’est-ce qui a changé?
Avant d’utiliser le Kanister, les Américains utilisaient des bidons cylindriques de 5, 10 ou 55 US gallons (19, 38 ou 208L). On comprend tout de suite que ces bidons sont peu faciles à manipuler et à stocker. C’est pour cela que les Américains adoptèrent aussi ce « kanister » qu’ils fabriquèrent dès 1941. Ils le baptisent « jerrycan », contraction de « jerry », surnom moqueur donné par les anglophones aux soldats allemands, et « can » signifiant récipient. Mais pour les rendre plus efficaces, ils modifient toutefois leur forme. La version américaine du bidon allemand est fabriquée à partir d’une simple tôle pliée puis soudée, formant le corps, sur lequel sont soudés le fond plat et une coiffe. Cette coiffe est composée de 3 poignés pour faciliter le transport. Il comporte en plus un bouchon à vis dont la dimension correspond à celle du secteur pétrolier. Ce qui leur permet d’employer un bec verseur.
Comment savoir ce que contiennent les jerrycans ?
Pour différentier les liquides transportés, des médaillons métalliques sont fixés solidement sur les poignées. Leurs couleurs et les inscriptions en relief, reconnaissables de nuit sans éclairage, renseignaient sur la nature du liquide. Les soldats pouvaient identifier l’essence du kérosène, du diesel ou de l’huile et sur les propriétés de ces liquides. Les jerrycans ne servant qu’au transport de l’eau potable sont, quant à eux, reconnaissables à la croix faite à la peinture blanche sur leurs flancs.
L’utilisation du jerrycan après la guerre…
À la fin de la guerre, la production du jerrycan continuera évidemment.
Cette invention est à ce point intéressante que les distributeurs pétroliers achèteront de grandes quantités en excès auprès des militaires pour commercialiser leurs produits. Bien sûr, ces bidons seront repeints aux couleurs de la compagnie pétrolière. Mais, le jerrycan commencera aussi à être largement utilisé par les particuliers qui le récupérèrent en quantité au bord des routes, abandonnés par les militaires après les combats.
Plus de 80 ans après sa conception, toutes les armées à travers le monde utilisent ce même conteneur à carburant pour équiper leurs véhicules. Et celui-ci n’a presque pas changé de forme.
Dans la culture populaire, il est aussi devenu l’accessoire incontournable pour partir en camping, comme le compagnon indispensable dans un véhicule en cas de panne. Il est même rentré dans l’imaginaire collectif. Rappelez-vous : dans « Tintin au pays de l’or noir », les mythiques frères Dupond et Dupont se perdent avec leur Jeep dans une terrible tempête de sable. Ils égarent alors leur jerrycan, qu’ils retrouvent un peu plus tard, parce qu’ils tournent en rond…